Le tireur d’avortement a-t-il visé à tuer des juifs ?

James Charles Kopp au tribunal, 2002 Image par Getty Images

La Cour suprême des États-Unis a rejeté lundi une demande du militant anti-avortement James Charles Kopp de revoir sa condamnation pour le meurtre en 1998 de l’obstétricien de Buffalo Barnett Slepian.

Kopp purge une peine d’emprisonnement à perpétuité dans une prison fédérale de Pennsylvanie suite à une condamnation de l’État de New York en 2003 pour meurtre au deuxième degré, ainsi qu’une condamnation fédérale en 2007 pour violation de la loi sur la liberté d’accès aux entrées des cliniques.

Il affirme que ses droits ont été violés par une représentation inappropriée, ainsi que par le refus d’un juge de le laisser témoigner sur sa vision de l’avortement. Il s’agissait de sa deuxième tentative infructueuse d’examen par la Cour suprême de son cas.

Slepian a été tué le vendredi soir 23 octobre 1998, peu de temps après son retour de la synagogue où il disait Kaddish pour son défunt père. Kopp a admis lui avoir tiré dessus à travers la fenêtre de la cuisine depuis les bois voisins avec un fusil de sniper de grande puissance.

La police canadienne considère Kopp comme un suspect dans une série de cinq fusillades similaires de prestataires d’avortement à leur domicile dans le sud du Canada et dans le nord de l’État de New York entre 1994 et 1998. Ces fusillades sont devenues connues sous le nom de fusillades du jour du Souvenir parce qu’elles ont toutes eu lieu quelques jours après. Le 11 novembre, marqué par les militants anti-avortement canadiens comme le jour du Souvenir des enfants à naître. Slepian, la dernière victime, était la seule victime.

Un aspect frappant de l’affaire, bien que rarement discuté, est le fait que quatre des cinq victimes étaient juives, et le nom de la cinquième est parfois décrit par les observateurs comme ayant une consonance juive (apparemment basé sur des spéculations officieuses des forces de l’ordre canadiennes fonctionnaires).

La question de savoir si l’identité des victimes indique un côté antisémite dans les motivations du tireur (ou des tireurs) est un sujet de controverse, quand il en est question. Mais il y a des preuves intrigantes. Cinq jours après le meurtre de Slepian à Buffalo, la police de Hamilton, dans l’État de New York, a trouvé une affiche de son visage dans les toilettes de la gare avec un X et les mots « Tueur, Juif, Nazi » griffonnés dessus. On ne sait pas si l’affiche avait un lien avec le tueur.

L’importance de la question dépasse la simple curiosité ethnique. Si le tireur ciblait spécifiquement les médecins juifs, qu’il soit inspiré par des théories du complot antisémite ou des statistiques réelles, alors la conclusion pointe vers une vague nord-américaine de terrorisme antisémite d’extrême droite au milieu des années 1990. C’est une information qui vaut la peine d’être connue, même 15 ans plus tard, pour évaluer les menaces actuelles et futures.

D’après le site Web du National Clinic Access Project, les victimes sont : Garson Romalis, Vancouver, 8 novembre 1994; Hugh Short, Hamilton, Ont., 10 novembre 1995 ; Jack Fainman, Winnipeg, 11 novembre 1997 ; David Gandell, Rochester, 28 octobre 1997, et Slepian.

La fusillade de Short, la seule victime non juive, est la seule en dehors de celle de Slepian dans laquelle Kopp a été inculpé. Les autorités canadiennes ont demandé que Kopp soit extradé pour être jugé, mais des responsables américains auraient insisté pour qu’il purge d’abord ses peines américaines.

Il purge des peines consécutives de 25 ans à perpétuité pour son accusation de meurtre dans l’État de New York et la perpétuité plus 10 ans pour des accusations fédérales, qui incluent le meurtre d’un fournisseur d’avortement et l’utilisation d’une arme d’assaut de style militaire équipée d’une portée dans la commission d’un crime violent.

En tant que militante anti-avortement connue, Kopp est devenue suspecte quelques jours après la fusillade. Il s’est enfui au Mexique, puis en Irlande et enfin en mars 2002 en France, où il a été arrêté avec deux faux passeports irlandais en sa possession. Le FBI croyait qu’il avait l’aide d’autres extrémistes. Il a été extradé vers New York en juin 2002.

Après avoir avoué dans une interview de Buffalo News en novembre 2002, dans laquelle il insistait sur le fait qu’il ne voulait blesser Slepian que pour empêcher d’autres avortements, il a renoncé à son droit à un procès devant jury et a été reconnu coupable en mars 2003 de meurtre au deuxième degré.

Dans son appel fédéral en révision, Kopp a affirmé qu’il s’était vu refuser un procès équitable devant un tribunal d’État parce que l’avocat qu’il avait choisi pour le représenter, Bruce Barket, avait un conflit d’intérêts puisqu’il représentait également deux personnes accusées d’héberger Kopp en tant que fugitif. Barket s’est vu interdire de représenter Kopp lors de son procès fédéral de 2007 en raison du conflit et Kopp a fini par se représenter lui-même.

La candidature de Kopp à la Cour suprême était un appel de deux décisions du tribunal de district américain en 2011 lui refusant un examen. L’une des décisions, rendue par le juge de district américain Michael Tedesca de Rochester, a pris note de l’insistance de Kopp à avoir Barket comme avocat et a qualifié son appel de « si malhonnête qu’il suggère la mauvaise foi ».

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