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Lantern magic, 10 rue Jean du Bellay 75004 Paris. Tel 43 25 78 40
Les Juifs espagnols internés au camp de Bergen-Belsen - 14 avril 1944 - 9 avril 1945
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Les Juifs espagnols internés au camp de Bergen-Belsen - 14 avril 1944 - 9 avril 1945
Dans le cadre de notre enquête
de mémoire sur les juifs espagnols et portugais de Salonique, déportés à
Bergen-Belsen - et non à Auschwitz - dans l’attente d’un
rapatriement vers la péninsule ibérique, nous évoquions entre autres la figure
de Flora Gattegno, déportée jeune avec ses parents, mariée ultérieurement à un
Perahia de Paris, décédée maintenant mais qui avait commencé de rédiger ses souvenirs de camp. Nous avons donc retrouvé sa propre fille mariée, Evelyne Grand, vivant en Israël et venant de publier ces jours-ci, en français, un petit livre intitulé «Le Deuxième Groupe», rassemblant les souvenirs de sa mère - mais que celle-ci n’avait pas encore mis en forme - sur ce séjour au camp de Bergen-Belsen, et complété de poèmes écrits ultérieurement. Evelyne commence par situer la position officielle de l’Espagne vis à vis de ses ressortissants. Puis elle nous rappelle que deux groupes de Saloniciens furent concernés par cette “protection”. Le premier groupe, composé de 367 personnes est resté à Bergen-Belsen du 30 juillet 1943 au 2 février 1944. Arrivé en Espagne le 10 février 1944, mais non autorisé à y rester, les Espagnols l’embarquèrent vers Casablanca. Là, le JOINT et l’UNWRA le prirent en charge. Suivant l’itinéraire Oran, Naples, Tarente, Port-Saïd avec des séjours plus ou moins longs dans les camps de ces villes, ce premier groupe arriva finalement le 4 décembre 1944 en Palestine. | Et Evelyne nous entretient du second groupe, isolé à l’intérieur du camp, mais d’abord de la manière dont ces gens ont été pris, ayant payé des “passeurs” de Salonique occupée par 1es Allemands vers Athènes occupée par les Italiens, dénoncés par ces mêmes passeurs ou d’autres gens, vendus aux Allemands pour cinquante livres/or chacun. Emprisonnés un par un, ou pris à la synagogue d’Athènes, ou s’étant eux-mêmes spontanément inscrits “en vue d’un rapatriement en Espagne”, 155 Espagnols et 19 Portugais, formant 74 familles dont 36 enfants de moins de vingt ans partirent d’Athènes en trois wagons à bestiaux le 2 avril et arrivèrent au camp le 11 avril 1944. La liste complète de ces personnes figure en annexe avec mention de leur âge. L’examen de cette liste nous apprend que ce “second groupe” n’est autre que celui énuméré dans : “Je reviens du camp de Bergen-Belsen” de notre ami David Benbassat-Benby, recueil de 1945 de ses reportages au «Journal d’Orient» d’Istanbul, en avril de la même année et réédité récemment à Istanbul (cf. les «LS» Nos 6 et 8). Evelyne nous confirme ainsi l’identité des compagnons d’infortune qu’Elie Jaffé - citoyen turc déporté de Milan et informateur providentiel de Benby - avait laissés à Bergen-Belsen puis énumérés de mémoire à son retour à Istanbul, un mois avant la fin des hostilités en Europe : un “scoop” retentissant qui marquera la carrière du jeune journaliste Benby. | Evelyne raconte aussi d’après les notes de sa mère comment la vie s’organise dans le camp sous l’autorité d’un comité interne, dont le chef David Benadon, ex-ministre plénipotentiaire d’Espagne à Salonique, accompagné de trois autres : Jos. Nehama, Saporta, Albert Benveniste, traite avec les Allemands, répartit équitablement les vivres (épisode de la fabrication d’une balance pour ce faire....) Albert Gattegno (le grand-père d’Evelyne) était le comptable et tenait un relevé scrupuleux des chiffres, notamment ceux des achats à la cantine des Allemands par son intermédiaire obligé : cigarettes, conserves de poisson, brosses à dent, fil à coudre etc. C’est souvent lui qui finançait par troc avec les Allemands, contre bijoux et petits diamants qu’il avait réussi à dissimuler dans la doublure de ses vêtements. Evelyne conserve précieusement ce cahier de comptes.... ! Le temps passe mal : les appels interminables dans le froid ou le chaud, les rats, la faim, les coups, les cris. Le premier tank américain aperçu le 13 avril 1945 a bien failli ne pas les voir alors qu’ils étaient abandonnés à eux-mêmes dans un village depuis quatre jours ! Après le transfert vers d’autres camps et les péripéties du retour, Evelyne dit ce qu’elle sait de la réinstallation de chacun des survivants (mais quelques uns sont morts au camp) ici ou là en Europe, Palestine ou Amériques. JC |